Bienvenue dans un monde de ouf !

Publié le par Jean-Louis

Novembre 2008 :

Cette année j'ai reçu de la visite plutôt rapidement !

Ma sœur Christine, Marc son copain et Lucas leur fils aîné; mon frère Vincent, et son fils aîné Fabien; leur tante Regine, son mari François, leur fille et leur fils Marie et Bernard ! Pour ce qui on mal révisé leur leçon sur la généalogie de ma famille je rappelle qu'en fait mon grand frère et ma grand sœur sont des demis et que donc toute cette partie de la famille n'a théoriquement pas la mienne.
Il faut dire qu'ils ne sont pas venu non plus que pour moi - ils ne faut pas exagérer non plus ! En fait, l'arrière grand-mère de mon frère et de ma sœur vivait à Vienne et ils venait assister à une commémoration car elle a été déportée en camp de concentration. Ils sont resté une semaine – sauf ma sœur qui est resté une semaine de plus.


Ça a rapidement tourné au délire complet rapport à toutes les personnes que nous avons rencontrées et aux coïncidences qui sont soudains apparues !

D'abord, habitant en plein dans l'ancien quartier juif, j'avais commencé à paniquer : « Tu vas voir que c'est sur ma porte qu'ils vont venir la poser leur plaque commémorative !!! » que je me disais ! En fait, je paniquais pour rien, quoique que je ne l'eusse point remarquée, il y en a déjà une devant l'entrée de mon immeuble ! Par contre, la grand-mère de mon frère et de ma sœur habitait avec leur grand-père à 2 minutes à pied de chez moi.

Comme le voyage était surtout organisé à l'initiative de la tante de Christine et Vincent, car elle est prof d'allemand et a beaucoup d'amis à Vienne dont Maria qui nous a aussitôt tous invités à l'opéra. Nous étions au 11ème rang !!! Maria connait un type qui ... C'était drôle parce que l'opéra en lui même était une pièce assez médiocre. Un drame bourgeois du 19ème. L'exécution était absolument parfaite ! Il y avait une telle différence entre la forme et le fond que j'en suis venu à me demander si le metteur en scène ne faisait pas dans l'ironie vengeresse : « Je dois mettre une merde en scène ??? D'accord et bien puisque c'est comme ça ce sera parfait !!!! ». Orchestre, décors et mise en scène au couteau ! Dégoulinant et grandiloquent au possible. Superbe !


Et puis, il y a eu des découvertes émouvantes qui tournent finalement toutes autours de l'histoire peu ordinaire d'une femme : la grand-mère de ma sœur et de mon frère. Pour autant que j'en ai compris les détails, je vais tenter de vous raconter son histoire.

Lisa est née à Vienne et a milité très tôt au PC. Alors qu'elle était encore en terminale, la police est venue la chercher au lycée car elle distribuait des tracs cocos. Après 3 mois de prison il est apparu que la seule façon pour elle de pouvoir continuer ses études, et accessoirement de sortir de prison, était de faire un mariage blanc avec un socialiste. Malheureusement, ça n'a pas suffit et il ne lui fut toujours pas possible de passer son bac. Entre temps son copain ayant été expulsé vers la Pologne pour les même raisons, elle est partie à Prague pour continuer ses études et le rejoindre.

Comme elle en a aussi profité pour travailler dans un centre qui préparait les jeunes des brigades internationales qui partait pour la guerre d’Espagne, elle a rapidement eu les mêmes problèmes... Une fois expulsé de Tchécoslovaquie donc... Elle annonce à son père qu’elle veut aller à Paris. Celui-ci lui dit : « d’accord mais d’abord j’aimerais que tu ailles voir Berlin. ». Et la voilà qui débarque à Berlin en 36... Quand on est juive et communiste c’est sûr que ça doit faire drôle. Figurez-vous qu’elle a pas aimé du tout ! Mais alors vraiment pas ! Et elle est partie aussi sec à Paris pour rejoindre son copain qui se préparait pour la guerre d’Espagne...

C’est là que ça se complique. Donc son copain qui s’appelait Koppel, et que nous appelerons n°1, part en Espagne pendant qu’elle reste à Paris. Là dessus elle se retrouve enceinte d’un autre militant communiste autrichien. Celui-ci que nous appellerons donc n°2, et qui s’appelait Platzer, lui dit : « bon tu es enceinte c’est un peu le bordel en ce moment par ici... J’ai un peu d’argent, on peut aller en Amérique. » et bien sûr elle répond : « Non ! Moi je suis communiste je veux continuer à lutter contre le fascisme... Va plutôt faire la guerre d’Espagne et l’on se retrouvera après. ». Donc le type part.

N°1 et n°2 survivent à la guerre d’Espagne et se retrouvent parqué dans les fameux camps français. Elle s’occupe donc d’essayer de faire sortir n°1 de son camps pendant la moitié de la seconde guerre mondiale... et ne fait rien pour n°2, si ce n’est se démerder avec son gosse qui est né entre temps...Finalement vers 42 elle réussit à faire sortir Koppel (n°1) de camps. Entre temps Platzer (n°2) est confronté au choix proposé à cette époque au réfugiés des camps espagnols : rester à pourrir dans les camps ou rentrer dans son pays d’origine... La collaboration étant ce qu’elle était, les autorités autrichiennes étaient généralement averties et venaient cueillir les cocos directement à la gare... Visiblement quand il est rentré en Autriche il n’a pourtant pas été arrêté à la gare comme beaucoup de ses amis, mais quelques semaines plus tard en 41... direction le camps de concentration de Dachau... Comme le montre les archives de la gestapo :

http://www.doew.at/php/gestapo/index.php?c=detail&l=de&id=2601


De son coté et pour vous donner un idée du caractère de la bonne femme, Lisa qui, en France, vient de réussir à faire libérer Koppel (n°1) reçoit une lettre de l’administration d’occupation allemande, seulement 3 mois après, demandant à ce que Koppel se présente pour être engagé dans l’armée... Folle de rage, elle se pointe direct au commissariat, avec son gosse de 2 ans sur les bras, et jette la lettre sur le bureau de l’officier allemand en disant : « vous pourriez m’expliquer depuis quand les allemands recrute des juifs dans leur armée ?! ». plouf plouf... Coup de bol le type était pas trop méchant, il l’a juste fait jeter dehors... et Koppel n’est pas parti...

Arrive la fin de la guerre et Platzer (n°2) sort de Dachau et rentre à Vienne. Par l’intermédiaire du parti communiste il fait faire des recherches pour retrouver Lisa et son gosse. Le resultat des recherches donne :

  1. Elle est toujours vivante

  2. Elle a refait sa vie avec un autre mec (Koppel n°1) et accessoirement son gosse

  3. Elle ne veut plus entendre parler de lui (Platzer n°2)


Récapitulons. Pour les beau yeux de la princesse Platzer a donc fait :

  1. La guerre d’Espagne

  2. Les camps de concentration en France

  3. Dachau (4 ans, comme me disait Pierre-Antoine Rambo à coté c’est une tafiole !)


Le mec pas dégouté s’est quand même remarié et a eu deux enfant, un fille et un fils.


Le gosse de Platzer (n°2) et de Lisa c’est André le père de mon demi-frère et de ma demi-sœur avec qui était avec ma mère avant de connaître mon père... Mon frère Vincent avait rencontré son grand-père biologique quand il était jeune mais ma sœur n’en avait jamais eu l’occasion. Quitte à être a Vienne elle a donc demandé à Régine s’il serait possible de le rencontrer. Cela ne fût pas possible... il est mort il y a quelques années déjà. Par contre ma sœur a rencontré sa deuxième femme et leur fils : Rudi.

Rudi est extrêmement sympathique et patient. Avec sa femme Andréa, ils nous ont vraiment fait un très bon accueil ! Il a d’abord été musicien, il est parti à New York avec son saxo pour apprendre le Jazz. De retour à Vienne il a monté avec des copains un café-concert d’avant garde dans les années 70. Après avoir revendu sa part et vécu sur ses réserves pendant dix ans, il vient de finir un nouveau cursus de... Guide touristique et culturel pour étranger... Autrement dit, il connait les meilleurs endroit de Vienne pour la musique et la culture... Il maîtrise parfaitement l’histoire de la ville, peut parler pendant des heures de peinture ! LE RÊVE ! Depuis je le vois régulièrement et je vais commencer à prendre des cours de Tango argentin avec sa femme.

Pour en revenir à l’histoire de Lisa, ma sœur Christine pas culotté pour deux sous s’est pointé à l’endroit où sa grand-mère vivait avant la guerre. Elle a frappé à la porte et s’est démerdé avec ses reste d’allemand à expliquer à la vieille dame qui lui a ouvert que Lisa vivait là par le passé... La femme lui a fait visité l’appartement, lui a offert le thé et elles ont discuté toute l’après midi ! Cette dame, tchèque, a acheté l’appart à une agence dans les années 50. Restait à savoir où Lisa allait au lycée... Vous vous souvenez ? Je vous avais dit qu’un de mes lycée est dans le même quartier et qu’il a plus de 100 ans. Après toute ces histoires j’ai dit à ma sœur : « bon, a tous les coup ta grand-mère elle allait dans mon école ! ». On est allé demander à voir les archives de mon lycée en expliquant le loufoque de la situation. Cela aurait été trop beau, d’autant qu’avec les mesure anti-juifs mon lycée était en ce temps là devenu un lycée réservé aux juifs. Mais c’était un lycée pour garçons. C’est finalement Régine qui a retrouvé les coordonnées de l’école : Stephaniestrasse 16, deuxième arrondissement. Impossible à trouver sur une carte... En effet, après recherche la rue à été rebaptisée en 1919 car les Pays-Bas ont beaucoup aidé l’Autriche à se relever après la première guerre mondiale... et donc depuis Stephaniegasse est devenu... Hollandstrasse ! Ma rue ! et d’après les numéros, le lycée se trouvait juste en face de chez moi !!


Bienvenue dans un monde ouf !

Publié dans intermondes

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